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Consolée

vendredi 7 juillet 2023

Consolée, Beata Umubyeyi Mairesse
Autrement, 2022

La rencontre de deux femmes Astrida, résidente d’un EPHAD et Ramata, cadre en reconversion professionnelle.

Le roman nous fait suivre une enfant et deux femmes : Consolée enfant métisse vit en 1954 au Rwanda sous domination belge ; Astrida réside dans un EPHAD de la région bordelaise en 2019, de plus en plus isolée par les progrès de la maladie ; Ramata, la cinquantaine, française née au Sénégal la rencontre à l’occasion d’un stage d’art-thérapeute qu’elle effectue pour achever la reconversion professionnelle qu’elle a engagée suite à un burn-out. Peu à peu nous allons découvrir le destin particulier de Consolée, qui l’a conduite d’un village rwandais jusqu’à l’EPHAD malnommée « Les Oiseaux » où s’agissant d’oiseaux ne survivent que trois malheureuses perruches.

Consolée, élevée par sa mère apprend beaucoup de son grand-père aveugle sur la nature qui les entoure. Mais l’enfant métisse n’est pas tolérée par ses oncles qui la conduisent à « l’orphelinat » de Save. Cet établissement accueille des enfants « mulâtres » arrachés à leurs familles en raison de leur métissage. A l’indépendance du pays, plusieurs centaines d’entre eux seront transportés en Belgique où des familles les adopteront. Consolée, devenue Astrida à Save aura alors un patronyme européen.

Ramata s’est efforcée jusque-là à l’assimilation. Elève brillante, elle deviendra cadre dans une grande collectivité, se conformant strictement à ce que l’on attend d’elle. A toujours éviter de se distinguer, elle craquera. Pour sa reconversion professionnelle elle choisit donc d’être thérapeute et la rencontre avec Astrida qui a perdu l’usage du français et ne s’exprime plus que dans une langue étrange et étrangère aux oreilles de son environnement la bouleverse. Alors que la directrice de l’EPHAD tente de la dissuader de s’intéresser plus particulièrement à cette résidente qu’il faudrait traiter comme les autres, Ramata développe une complicité avec Claude, jeune psychologue canadienne, référente de l’EPHAD. Elles deux vont mener une véritable enquête et grâce à l’association des anciens de Save, élucider le parcours d’Astrida qui par le mariage a acquis la nationalité française et un nom à consonnance grecque.

Le roman est donc l’occasion de faire connaître la pratique qui a eu cours au XXème siècle dans les colonies belges, celle de l’enlèvement des enfants métis à leurs familles pour les regrouper dans des « orphelinats » gérés par des églises. De telles pratiques auraient aussi existé dans les colonies françaises (voir note plus bas). Ces enfants de pères européens sont généralement issus de concubinage ou de viols ; leur couleur de peau les expose aux regards de tous, d’où la volonté des deux communautés de les cacher. Le personnage de Ramata, immigrée de religion musulmane qui se fait violence pour être acceptée par « lafrance » et les réactions des membres de sa famille permettent aussi à l’auteur de traiter des façons de vivre l’immigration, des injonctions sociales faites aux immigrés et à leurs descendants, et de la transmission des cultures. Aborder ces sujets sérieux n’empêche pas ce très beau texte d’être empreint de poésie et d’humanité.

Note : Par exemple à l’orphelinat de Bingerville (Côte d’Ivoire), surnommé le « foyer des métis ». « On allait les chercher dans les villages. Dès qu’on en voyait un, on envoyait les gardes coloniaux le récupérer et l’emmener à Bingerville », explique le général Edouard Assamoua, auteur du livre « De la maison des métis aux orphelinats de Bingerville et Grand Bassam de 1903 à 2018 » (Ed. Bala) (vu sur le site caminteresse, 29 mars 2023).

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